RESISTER.
Pendant la guerre, le prêtre Jean Darigault a fondé un groupe de résistance. Arrêté, il est envoyé en camp de concentration. Là, il exprime sa foi, son espérance à travers des œuvres qu’il réalise sur des morceaux de papier journal allemand.
NB: La résistance, c’est héroïque. La dénonciation, c’est honteux, c’est l’oeuvre du Diable. Puissons-nous toujours faire le bon choix, celui du respect de la VIE d’autrui!

La Nativité (1942), Jean Daligault (1899-1945)
Pourquoi le nom de Jean Daligault est-il si peu connu ? Prêtre du diocèse de Bayeux et Lisieux, résistant de la première heure, peintre et sculpteur, déporté en Allemagne où il mourut le 28 avril 1945, cet homme était hors du commun par son caractère et ses talents comme par sa vie. Il a laissé de son passage dans les camps et prisons nazis des témoignages artistiques bouleversants.
Dans le dénuement
C’est dans le plus radical dénuement que fut réalisée cette Nativité. Elle porte assez mal son nom, puisqu’il s’agit d’une Sainte Famille. Trois couleurs, cinq personnages. Tout en haut, deux bâtisses angulaires évoquent non Nazareth, mais la désolation de l’univers carcéral. Suggéré par les têtes de Joseph, de Marie et des deux hommes de dos au premier plan, où l’on ne peut s’empêcher de voir des prisonniers, un rond de douceur entoure l’enfant. Les auréoles, les contours des épaules et des cols, les bras symétriquement ramenés vers la poitrine de Marie et de Joseph, tout est courbe, et les traits gras renforcent la simplicité et la chaleur paradoxale du dessin. À travers la peinture de cette Sainte Famille, on voit le papier du journal allemand récupéré par le matricule 5316.
Pendant ses années de sacerdoce dans le Calvados, Jean Daligault avait fabriqué une gigantesque crèche qui s’illuminait et s’égayait de musique, construit sa propre voiture, mais aussi un avion, un bateau : non content de peindre, l’abbé était mécanicien. Dans les tristes lieux qui furent ses demeures entre 1941 et 1945, il mettra cette ingéniosité au service de son art, utilisant des moyens de fortune pour peindre et sculpter. Pour pinceau, de la paille ; pour support, du carton, des journaux, des planches, des os ; en guise de couleurs, de la peinture grattée sur les murs, du charbon de bois, de la chaux, de la suie, de la rouille. Un dépouillement absolu qui entre en résonnance avec la venue sur terre du Fils de Dieu, destiné à souffrir aux mains des hommes.
Pour la liberté
L’occupation nazie n’est pas la première expérience de guerre de l’abbé ; mobilisé dès 1917, il a travaillé, pendant la Première Guerre mondiale, dans une école militaire en Syrie puis dans les services de cryptage. Il reste d’importantes zones d’ombres dans sa vie, de très nombreux voyages inexpliqués, un retrait momentané de sa charge de curé : certains biographes ont émis l’hypothèse que Jean Daligault ait été un agent du renseignement, dès avant 1939-1945. Ce qui est certain, c’est que ce prêtre osait tout. Il était en tous ses choix un « Français libre ».
Capable de fonder, dès août 1940, avec le cabaretier et l’instituteur athée de Villerville, dont il était curé, un groupe de résistance qui rejoint le réseau de l’Armée des Volontaires et lui vaut d’être arrêté un an après. Capable de dire, pendant l’appel interminable au camp de concentration de Hinzert, au témoignage d’un co-détenu : « Moi, ils m’emmerdent, je m’en vais », et de rentrer au baraquement. Capable de supporter la torture. En art, il était passionné par la peinture contemporaine, désireux de délaisser la peinture figurative traditionnelle où il s’était fait un petit renom local pour emboîter le pas aux courants novateurs des Nabis, de Van Gogh, de Picasso, d’artistes de Montmartre qu’il avait rencontrés. Incarcéré, il créera, sans rien, mais avec génie.
Incompréhensible espérance
Vers Jésus s’inclinent ses parents. Joseph, longue barbe, semble lui tendre un objet ; Marie, voilée, le désigne. Les deux têtes du premier plan sont plus grosses que celles de la Sainte Famille : Daligault a créé une perspective qui permet à qui regarde son œuvre de trouver sa place, derrière les deux hommes, pour se joindre à ceux qui font cercle autour de l’enfant. Légèrement tournés l’un vers l’autre, les assistants semblent se parler. Que disent-ils ? Leur surprise, leur émerveillement, leur désespoir, leur incrédulité?
En prison, Jean Daligault ne priait pas avec ses frères prêtres. Il a surtout peint et sculpté des portraits, des caricatures des bourreaux, des scènes d’un quotidien horrifique. Il supportait mal les « bigotes » et les « bondieuseries », malgré une foi personnelle vive. Mais peindre l’Incarnation au sein d’un univers déshumanisé, pour des compagnons décharnés, peindre la tendresse familiale et divine depuis un abîme de cruauté, n’est-ce pas nécessairement croire, et surtout espérer ?
Les quelque deux cents œuvres de camp de Jean Daligault ont justifié cette espérance : confiées à l’aumônier de la prison de Trêves qui les cacha dans sa cave, elles ont traversé un bombardement qui détruisit le presbytère, et c’est un autre prêtre français, ancien déporté, l’abbé La Martinière, qui, revenant sur les traces de la déportation pour en retrouver des témoignages, les recevra de l’abbé Jonas.
L’abbé Daligault est mort exécuté à 46 ans, il y a quatre-vingts ans. En se livrant à la création artistique du fond d’un gouffre de misère et de souffrance, il a réalisé le vœu que formulait une autre déportée, Etty Hillesum : « Pour peu que nous fassions en sorte, malgré tout, que Dieu soit chez nous entre de bonnes mains. »
Delphine Mouquin
Prions le Rosaire pour la paix, avec Notre-Dame de Fatima.
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SUPPLEMENTS:
–la Résistance: des armes au dessin
https://histoire-image.org/etudes/jean-daligault-artiste-detenu
– la résilience par la musique.
Au Liban, pays meurtri par la guerre, chanter Marie est source de paix. « Marie, Reine de la Paix et de la Réconciliation, priez pous nous! »
C’est dans la revue de prière MAGNIFICAT que j’ai découvert cet article concernant Jean Daligault .

